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Image libre de droit issue de https://www.collective-evolution.com/2016/02/17/study-finds-dogs-can-actually-read-human-emotions-show-empathy/ |
A - Une longue relation de proximité, rendant possible un contact privilégié
Plusieurs éléments favorisent le choix du chien pour une aide aux personnes malvoyantes. L’histoire de l’évolution du chien lui-même montre que l’humain y occupe une importante place. Au départ descendant du loup, le chien s'en sépare à la suite d’une domestication biologique. Sa mise en contact avec l’humain a entrainé un échange génétique entre les deux espèces (humaine et canine) au sein de leur environnement. Le processus de domestication du chien s’est fait par de nombreux facteurs. L’humain a une grande place dans ces facteurs car en se développant à proximité du chiens, les deux espèces ont chacune apporté des éléments à l’autre. On voit alors, qu’au-delà de l’aspect affectif avec l’appellation du chien comme « le meilleur ami de l’homme », les liens qui réunissent l’humain et le chien remontent à l’apparition de l’espèce. Cela crée une sorte de filiation non biologique, mais tout de même présente et favorise au cours des années la bonne entente entre le chien et l’humain qui favorise la formation de ce binôme que ce soit à des fins médicale ou affective. On voit également qu’en plus de pouvoir être un chien-guide, le chien rempli également plusieurs autres fonctions comme le pointe Jean-Marie Brhom : « Présent dans presque toutes les sociétés humaines, il [le chien] est capable de remplir de très nombreuses fonctions : économique (chiens de trait), sécuritaires (chiens policiers), militaires (chiens d’assauts), scientifiques (objet de vivisection), humanitaires (chiens guide d’aveugles, chiens sauveteurs, chiens d’auxiliaires de vie), sportives (chiens de traîneaux, chien de course), alimentaires (chien de boucherie). »[1]
Il est important de souligner la diversité de chiens qui existe. En effet, de nombreuses races de chiens, avec principalement deux regroupements de chiens : les chiens de race et les chiens bâtards. Les chiens de race ont une race unique et les chiens bâtard une race mixte. 90% des chiens guides sont des labradors et des golden retriever[2]. Ces chiens ont de multiples qualités qui favorisent leur devenir de chien guide. Le labrador est la race de chien ayant plus de facilité à apprendre et à s’adapter, il est sociable, affectif et facile à entretenir. Le golden retriever est intelligent et se soumet facilement, en plus d’être également sociable et affectif. Les autres choix de race sont pour des demandes plus spécifiques. Les spécificités des races de chiens consolident le choix du chien pour aider des personnes malvoyantes. Ils ont de grandes qualités et ont quasiment de manière inné une facilité à vivre avec l’humain. [3]
La communication entre le chien et l’humain est aussi un critère qui favorise ce binôme. Il est courant de penser que le chien comprend toutes les paroles que les humains leurs disent, mais c’est faux. Les moyens de communications entre le chien et l’humain sont multiples. Il y a la communication sonore qui se fait par la voix du chien, il y a divers sons comme les aboiements, les hurlements, ou les jappements. Les plus utiles et importants pour aider au mieux une personne malvoyante au quotidien, sont les aboiements qui peuvent être utile à la perception d’un bruit par exemple car le chien entend des fréquences plus hautes que les humains. Les jappements sont aussi très utiles, car ils permettent au chien d’attirer l’attention, dans un environnement urbain en plain mouvement, cela permet à la personne malvoyante de rester concentrer sur le chien et se déplacer au mieux en évitant toutes sortes d’obstacle soudain ou majeur.
B - Un binôme créé scrupuleusement, par une sélection et une éducation précises et rigoureuses
Tous les chiens ne peuvent pas devenir chien d’assistance. D’une part, il faut que ceux-ci soient capable de supporter le harnais durant les sorties, ce qui nécessite une bonne conformation et une bonne ossature. Il doit également être adapté à la taille de la personne qu’il assiste. C’est pourquoi il doit être de grande taille, de manière à pouvoir accomplir certaines tâches en hauteur (transactions aux guichet…). Ainsi les chiots labrador, golden Retriever, Berger Allemand sont les plus éligibles à être chien guide d’aveugle. De plus, ses races de chiens sont les plus représentées car ces chiens ont des qualités nécessaires pour former un bon binôme avec l’être humain. D’une part, comme expliqué plus tôt, pour leur capacité à écouter mais pour celle à retenir des ordres ainsi que leur gentillesse, leur sociabilité et leur avenance par nature. La sélection des chiots se fait lorsqu’ils ont entre 5 et 7 semaines. Les éducateurs s’ils n’ont pas leur propre élevage au sein des écoles ou des associations, contactent des centres d’élevages spécifique, et effectuent une visite qui a pour but de voir quels chiots à les prérequis nécessaire, c’est-à-dire si son contact avec l’humain est correct, s’il est timide ou pas etc… Ensuite, les chiots arrivent par la suite à l’école à l’âge de 9 semaines. Ils sont gardés moins d’une semaine au sein de l’école ou de l’association et sont remis directement à des familles d’accueil.
Les familles d’accueils jouent un rôle essentiel dans la socialisation du chien. En effet, les chiots y restent presque pendant deux années de leur éducation et ces années vont se révéler cruciales dans la formation du chien. La famille d’accueil a une mission double, d’une part socialiser le chien, c’est-à-dire lui apprendre des règles de vie comme l’obéissance ou encore la propreté. Mais elle doit aussi l’habituer à la complexité du monde extérieur pour lui permettre de développer des réflexes qu’il doit avoir au quotidien dans son travail de guide. Pour cela, le chien accompagne un membre de la famille ou plusieurs dans son activité professionnelle.[4] Une fois son stage en famille d’accueil terminé le chien va effectuer des tests sur sa condition physique, pour s’assurer qu’il n’a pas de problème articulaire ou de vue, mais aussi des tests psychologiques, pour vérifier qu’il n'a aucune agressivité ou phobie. S’il ne les valide pas, il est réorienté. S'il les valide, il est replacé dans son école ou association pour 6 mois de formation intensive[5]. En effet, le chien est mis en condition et c’est durant ces mois à l’association que celui-ci va être formé réellement à son travail de chien guide. Pour cela, les éducateurs en situle mettent en situation c’est-à-dire que celui-ci est emmené dans la rue avec un éducateur de l’école et il s’entraîne à le guider. C’est de cette manière qu’il va apprendre les gestes qu’il devra avoir au quotidien avec la personne qu’il guidera ainsi que plus de 50 ordres, tels que assis, couché, indiquer une bouche de métro, apprendre à ne pas écouter les ordres s’il met en danger la personne. Mais il acquiert aussi des réflexes tel que traverser lorsque le feu est rouge ou vert, à s’arrêter devant un passage piéton, à se stopper lorsqu’il arrive devant des escaliers, à ralentir lorsqu’il le faut, à marcher avec une allure qui correspond à son compagnon ou encore à éviter les obstacles tout en faisant en sorte que la personne qu’il guide les évite aussi.[6] C’est aussi durant cette période que le chien va s’habituer à son harnais.
Les chiens d’aveugles présentent en effet beaucoup d’avantage que la canne n’a pas, néanmoins très peu de chiens sont formés - notamment car, comme évoqué plus haut, la formation est très coûteuse. Par conséquent, peu de personnes aveugles peuvent bénéficier de ce luxe. Ainsi la sélection faite est extrêmement rigoureuse : nous notons seulement 220 remises de chiens guides par an pour 207 000 personnes aveugles en France[7]. Plusieurs critères doivent être remplis par la personne atteinte de déficience visuelle. Déjà, la personne doit avoir minimum 12 ans et avoir des revenus suffisant pour pouvoir subvenir aux besoins du chiens, car bien que le chien soit offert et malgré une compensation animalière de 50 euros par mois fournit par la MDPH[8] (Maisons départementales des personnes handicapées), la nourriture et l’entretien sont à la charge du maître. Mais cette personne doit aussi avoir déjà acquis un certain degré d’autonomie, être à l’aise dans ses déplacements avec la canne. Pour vérifier cela, la personne est mise en situation de déplacement accompagnée d’un éducateur du chien pour qu’il vérifie s’il a ce prérequis de déplacement. Après ces tests, les personnes souhaitant bénéficier du chien sont classées [9]. D’une part, il y a les personnes ne pouvant pas avoir de chiens guided, d'autre part, celles qui pourront en avoir un mais qui n’ont pas encore tous les prérequis de déplacement nécessaires : celles-ci vont être formées [10]. Enfin, contrairement à ce que laisse supposer le terme chiens guide d’aveugle, la personne ne doit pas forcément être atteinte de cécité complète, une personne étant malvoyante profonde peut aussi se voir accorder un chien.
C – Apprendre à vivre ensemble après la formation
Une fois le chien ramené à la maison, une nouvelle étape commence : l’accommodation à la nouvelle vie aussi bien du maître que de son animal. C’est un nouveau contexte auquel chacun doit s’adapter et apprendre à cohabiter et collaborer, maintenant que la théorie s’ancre dans la vie réelle et nouvelle. Il faut appliquer les leçons apprises à l’environnement dans lequel le binôme évoluera dorénavant. C’est pour cette raison qu’il est aussi important d’avoir un environnement stable, facilité par l’établissement d’une routine par exemple, pour aider au confort du ou de la malvoyant·e mais aussi à l’ancrage des repères du chien et donc au bon exercice de ses devoirs.
En effet, bien que les écoles fassent tout leur possible pour préparer le binôme à sa future vie de compagnons, elles ne peuvent fournir un enseignement parfait. Il y aura toujours des imprévus par rapport à la situation de chacun, et certains aspects ne sont même pas couverts. C’est le cas des relations qui se créent entre le chien guide et l’entourage de son ou sa propriétaire. Parfois même, le chien en tant que familier permet d’emprunter le rôle de médiateur avec d’autres humains, voire prendre un rôle dans la famille[11].
De plus, au-delà des habitudes à apprendre à la maison, il s’agit aussi pour la nouvelle équipe de s’adapter à l’extérieur. Un·e propriétaire peut faire face à de la discrimination pour son handicap, à des problèmes financiers, doit être très prudent·e dans la rue aux dangers qu’iel ne peut pas voir, comme les automobilistes dangereux, entre autres. C’est pour gérer ces problématiques et de nombreuses autres que certains aménagements sociétaux ont été réalisés pour accompagner les malvoyant·e·s et leur chien guide dans cette période de vie commune. On peut ainsi penser à plusieurs exemples : certains établissements ou transports refusant l’accès aux animaux font une exception pour les chiens-guides ; des aides financières et assurances sont accordées aux concerné·e·es ; ou encore, certains feux de signalisation sont aussi dotés d’annonces sonores. Autant d’aides fournies et qui continuent de progresser afin d’accompagner ces binômes, pour les soutenir dans leur vie commune.
La formation du binôme humain et chien ne date pas d’hier, mais remonte à des milliers d’années, ce qui fait du chien le meilleur animal pour venir en aide à l’humain. De plus, sa diversité permet d’aider au mieux les personnes aveugles, notamment avec les multiples races qui existent avec leur spécificité, permettant de choisir les chiens-guides avec minutie. Cette sélection rigoureuse se poursuit dans la formation du chien-guide avec l’éducation et le dressage en plus de l’adaptation à la nouvelle famille. Une forte relation prend alors forme en créant une inter-spécificité qui peut mener à une forme de dépendance à analyser.
[1] Brohm Jean-Marie, « Le chien, une figure de compagnon polyvalent », in Topique, no 1, n° 142, 30 avril 2018, p. 31‑42.
[2] Fédération Française des Associations de Chiens guides d’aveugles F.F.A.C, Les races de chiens d’aveugles : labrador et golden retriever, https://www.chiensguides.fr/actualites/pourquoi-majorite-chiens-guides-sont-labradors-et-golden-retriever
[3] Fédération Française des Associations de Chiens guides d’aveugles F.F.A.C, Les races de chiens d’aveugles : labrador et golden retriever, https://www.chiensguides.fr/actualites/pourquoi-majorite-chiens-guides-sont-labradors-et-golden-retriever
[4] Mouret Sébastien, « Iros. Un chien guide d’aveugles, un travailleur du care », in Vacarme, no 1, vol. 70, 2015, p. 192‑203.
[5] Les chiens guides d’aveugles : histoire, sélection, formation..., https://www.chien.com/le-chien-50/usages-du-chien-50001/les-chiens-guides-d-aveugles-histoire-selection-formation-18813.php , 16 novembre 2019
[6] Debarge Yasmine, « Vivre avec une assistance animale, ou comment la présence d’un chien guide d’aveugle redéfinit les relations du déficient visuel avec les autres membres de la famille », in Enfances, Familles, Générations, no 32, 2019.
[7] Chien guide d’aveugle : quels avantages et inconvénients ?, https://webzine.okeenea.com/chien-guide-aveugle-avantages-inconvenients/ , 30 septembre 2019
[8] Prestation de compensation du handicap, https://handicap.gouv.fr/les-aides-et-les-prestations/prestations/article/prestation-de-compensation-du-handicap-pch
[9] Debarge Yasmine, « Vivre avec une assistance animale, ou comment la présence d’un chien guide d’aveugle redéfinit les relations du déficient visuel avec les autres membres de la famille », in Enfances, Familles, Générations, no 32, 2019.
[10] Fédération Française des Associations de Chiens guides d’aveugles F.F.A.C, Demander un chien guide, https://www.chiensguides.fr/personne-deficiente-visuelle/demander-chien-guide , 26 juillet 2016
[11] Cohen Susan Phillips, « Can Pets Function as Family Members? », in Western Journal of Nursing Research, no 6, vol. 24, 1 octobre 2002, p. 621‑638.
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