Kali, la déesse poulpe

                                                                  


La ressemblance est frappante : plusieurs bras, un don pour la métamorphose, parfois un penchant pour la destruction… Les divinités hindoues semblent issues des mondes sous-marins tant leurs points communs avec les poulpes sont grands !


Plusieurs bras

En effet, l’iconographie religieuse aurait pourvut les dieux hindous de plusieurs bras pour convaincre de l’étendue de leurs pouvoirs, plaçant dans chaque main un attribut symbolique, figurant un pouvoir, une fonction ou un principe propre à la divinité. De la même façon, les poulpes sont dotés de huit membres. Fait notable : la plupart de leurs capacités sont également liées à leurs bras puisqu’à la racine de chaque membre se trouvent un cerveau périphérique : le poulpe est donc, fort de ses neuf (huit plus un) cerveaux, le recordman sur Terre en la matière !


Un goût pour la métamorphose

De plus, la multiplicité des formes est un point récurrent dans la religion hindoue : chaque divinité peut être adorée et donc perçue par les croyants sous trois formes (icône tri-dimensionnelle, forme géométrique bi-dimensionnelle ou prière sonore). En outre, il est, dans la mythologie hindoue, parfois question de métamorphose : façonnés par le dieu de la création Brahma, les Vanara forment un peuple de singes aux comportements humains. Sûrement le plus connu d’entre eux, Hanuman aurait un pouvoir de métamorphose : il est capable de changer de taille et gagner une force incroyable. Il est de plus considéré comme un très grand savant… Ceci n’est pas sans me rappeler un autre être (d’une stature moins divine il est vrai), sachant se transformer et doté d’une grande intelligence : notre ami le poulpe ! En effet, la pieuvre – nom donné par Victor Hugo au poulpe (Les travailleurs de la mer, 1866), resté dans le langage courant – est capable de se camoufler, dans un instinct de protection lui permettant de se fondre dans le paysage ou de prendre une apparence plus menaçante, mais aussi selon ses humeurs : Sy Montgomery fait le récit qu’il arrive à des pieuvres à qui l’on donne un exercice difficile pour la première fois de changer à plusieurs reprises de couleurs, comme un humain qui se concentrant se mordillerait la lèvre ou froncerait les sourcils (L’Âme d’une pieuvre, Calmann-Lévy, 2018, p. 104).


Un penchant pour la destruction

Enfin, la destruction prend une grande place dans le culte hindou puisque Shiva, dieu de la destruction représente un tiers de la trinité, qu’il forme avec Brahma (dieu de la création) et Vishnu (dieu de la persévérance, du maintien). A l’instar de Shiva, le poulpe montre tantôt des signes d’agressivité, voire de volonté destructive… Tellement que longtemps dans l’imaginaire collectif, l’animal marin était considéré comme un monstre, associé au Kraken qui effrayait les navires, mêmes pirates.


Kali

La ressemblance la plus frappante est celle avec la déesse Kali, parèdre (associée) de Shiva, qui prend la forme de Kaili, déesse hindoue à huit bras dans « Help ! », film de Richard Lester, starring les Beatles, dans les sixties. De nature colérique, les mythes font d’elle celle qui marcha – littéralement – sur Shiva, avant de devenir son parèdre : elle peut alors être considérée comme l’une des divinités les plus fortes, à l’instar de la pieuvre géante du Pacifique, plus grand céphalopode connu au tempérament hargneux. Enfin, quand elle prend la forme de Prâkriti, elle danse en agitant ses bras, faisant penser à nos céphalopodes préférés en mouvement.

Ainsi, la pieuvre star du bocal « Pacifique » de l’aquarium de Boston entre 2015 et 2017 s’appelait… Kali !

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