Les enjeux de la relation malvoyant·e - chien guide : Introduction

 

Image libre de droit issue de https://www.chiens-guides-grandsudouest.org/nous-soutenir/legs-et-donations/

« Aucune bête », écrit Robert Delort, « n’est aussi dépendante de l’action humaine que le chien, et c’est sans doute pourquoi aucune n’a de fonctions aussi nombreuses et diversifiées : broyeur domestique, lécheur de fonds de casseroles, garde vigilant des maisons et des troupeaux, pisteur émérite mettant son flair au service de son maître, qu’il soit ramasseur de truffes ou chasseur, douanier à la recherche de drogue, gendarme traquant les voleurs ou les prisonniers en cavale »[1]

    En effet, le chien est multifonctionnel, nous le connaissons aussi dans ses fonctions plus altruistes, comme par exemple celle de chien guide. Effectivement, dans un contexte où une personne aveugle naît toutes les quinze heures et où 1,7 millions de personnes sont atteintes d’un trouble de la vision[2], les chiens d’aveugles sont d’avantage sollicités en France. Bien que la majorité des déficient·es visuel·le·s ont encore la traditionnelle canne blanche, nous observons que les chiens guides séduisent de plus en plus. Ceux-ci permettent de compenser ce handicap dans la vie quotidienne de ces personnes. Bien que tous les aveugles n’optent pas pour cette option, elle a de nombreux atouts indéniables que la canne ne présente pas. Un allié de taille, un compagnon et une aide, le chien doit être éduqué pour pouvoir convenir à tous ces rôles. De plus, le chien n’est pas seulement un outil ou un animal de travail, mais il prend aussi la place d’animal de compagnie et de compagnon de vie. Puisque lorsque le binôme est créé, une véritable relation commence, le chien et son·a maître·sse deviennent tou·te·s deux dépendant de l'autre. Mais alors pouvons-nous vraiment parler de relation maître·sse-chien ? Nous observons que l’appellation « maître » est très utilisée, néanmoins, en employant ce terme, nous insinuons qu’il y a une hiérarchie dans ce binôme et que l’humain·e est supérieur·e à l’animal. Pourtant, l’humain·e aussi est très dépendant·e de son animal dans sa vie quotidienne et pour de nombreuses tâches. En effet, son chien lui facilite les déplacements et lui apporte un sentiment de sécurité, entre autres. Également, l’humain·e est dépendant·e de son chien pour acquérir de l’autonomie supplémentaire. Ainsi plus tôt que de parler de relation chien-maître, ne devrions-nous pas plutôt parler de binôme ou encore d’équipe ? Puisqu’en effet, plutôt que d’une relation de hiérarchie nous pouvons parler d’une relation de double dépendance, dans la mesure où le chien guide son·a maître·sse au quotidien et le·a maître·sse répond aux besoins du chien. Mais comment se crée cette relation chien-humain·e si elle ne repose sur aucune forme de hiérarchie ? Plus précisément, comment est pensé ce binôme fonctionnant sur un système de double dépendance ? Nous analyserons dans un premier temps la genèse de la relation maître·sse-chien-guide. Puis nous observerons celle relation dans ses détails pour en relever sa complexité et notamment ses mécanismes d’interdépendance. Enfin, nous mettrons en évidence qu’au-delà de la dépendance, cette relation s’illustre également comme une relation de compagnonnage.


[1] Delort Robert, Les animaux ont une histoire, Paris, Éddu Seuil, « Points Histoire 174 », 1993, 503 p., p.353
[2] Quelques chiffres sur la déficience visuelle | Fédération des Aveugles de France, https://aveuglesdefrance.org/quelques-chiffres-sur-la-deficience-visuelle

Aucun commentaire